Sous la loupe : l’imperfection humaine dans l’apprentissage en ligne synchrone
Vous êtes dans une réunion Zoom. Votre posture est parfaite et les quarante-trois muscles de votre visage sont contractés pour afficher une expression qui tente d’exprimer que vous ne voudriez être nulle part ailleurs! Nous sommes tous passés par là. Et puis, au moment précis où votre réunion se termine, c’est comme si vous mettiez « la switch à off » : tout votre corps se détend et reprend sa position habituelle de bureau à la maison, et votre expression faciale revient à sa position neutre. Peut-être même enfilez-vous à nouveau votre pyjama…
Pour les étudiants comme pour les enseignants, la vidéoconférence peut s’avérer un exercice exigeant axé sur la représentation. L’expression « fatigue Zoom » a été couramment utilisée pour décrire ce phénomène émergent. Jonathan Forani de CTVNews écrit que « la vidéoconférence […] exige une “charge cognitive” accrue, ce qui signifie que les utilisateurs envoient et reçoivent plus d’indices que dans un cadre normal, incluant la nécessité de se cadrer dans la caméra, de tenir compte du volume de sa voix et d’offrir des réactions plus physiques comme le fait de hocher la tête à un interlocuteur. »
Mais voici la question qui se pose à propos du cadrage, du réglage du volume et des hochements de tête : à qui tout cela est-il destiné? Si un enseignant établit un contact visuel avec un étudiant dans une salle de classe, il est presque impossible pour ce dernier de ne pas reconnaître cette prise de contact par un signe de tête ou tout autre geste indiquant qu’il est bien présent et à l’écoute. Après tout, à ce moment-là, les étudiants regardent l’enseignant et personne d’autre. Cependant, lorsqu’un étudiant utilise une application de vidéoconférence comme Zoom, il peut avoir le sentiment troublant que l’enseignant le regarde… tout le temps! Et ses camarades aussi. Ainsi, l’impulsion à reconnaître l’orateur en classe est multipliée jusqu’à devenir un comportement standard, inébranlable — un élément de l’étiquette Zoom, si vous voulez. De plus, une autre personne qui vous regarde en permanence : vous-même. Et ce reflet perpétuel de soi, que les chercheurs de Stanford ont appelé le « miroir quotidien », peut entraîner des remises en question et des doutes sur soi (Jeff Hancock, directeur fondateur du Stanford Social Media Lab).
Cela étant dit, est-ce possible d’atténuer la fatigue induite par la vidéoconférence? La réponse est oui.
Voici quelques recommandations pratiques à cet effet :
- Si vous utilisez la caméra, retirez la grille de vidéoconférence du mode plein écran. Réduire la taille de la grille de vidéoconférence « permet de créer une bulle d’espace entre soi et la grille », selon Jeremy Bailenson, directeur fondateur du Stanford Virtual Human Interaction Lab. En d’autres termes, cela crée une séparation entre le moniteur/la classe virtuelle et vous-même/l’espace personnel.
- Utilisez la camera avec parcimonie. Mais encouragez les utilisateurs à télécharger des photos, afin que la grille ne devienne pas non plus une étendue de boîtes noires. Le fait de ne pas avoir à surveiller sa propre réflexion réduit la charge cognitive. En outre, au lieu de reconnaître les orateurs par des gestes et des expressions faciales, encouragez la réactivité sous la forme de contributions à un salon de discussion ou même de boutons de réaction!
- Voyez-le davantage comme un environnement « en personne ». En d’autres termes, si vous vous trouviez dans une salle de classe physique, les épaules de tout le monde ne seraient pas droites et tournées vers l’enseignant. Les étudiants n’auraient pas à se soucier de rester en place dans un cadre restreint. Une solution à ce problème pourrait être de placer votre caméra plus loin de vous pour permettre une plus grande amplitude de mouvements tout en restant visible pour les autres.
- Vous vous souvenez des téléphones? Utilisez-les! Les séminaires et les cours théoriques ne peuvent pas être donnés efficacement à l’aide d’un téléphone; les fonctionnalités ne sont tout simplement pas suffisantes. Cependant, les réunions et les conversations individuelles peuvent être faites via un téléphone personnel. Cela peut permettre aux étudiants de se déplacer librement dans leur espace personnel tout en restant impliqués en tant qu’apprenants.
- Encouragez les « pauses cognitives ». Il est important que les enseignants prennent en considération le besoin de leurs étudiants de se désengager, même de façon temporaire, des exigences de la vidéoconférence. Comme l’écrivent Mahar et al. (2007), « […] de longues périodes d’enseignement sans pause peuvent être contre-productives pour les performances scolaires ». Les pauses cognitives peuvent « accroître toutes les caractéristiques que nous souhaitons chez nos étudiants : l’attention, l’énergie et un cerveau qui fonctionne bien (Ferrer & Laughlin, 2017) ».
Ces stratégies peuvent représenter des stratégies réellement efficaces pour atténuer les effets de la fatigue liée à Zoom. Il pourrait aussi être intéressant pour l’enseignant d’entamer une discussion avec ses étudiants sur le sujet de la fatigue induite par la vidéoconférence. Nous utilisons les logiciels de vidéoconférence de la seule manière que nous connaissons, avec une colonne droite et un sourire Colgate. Et s’il existait d’autres moyens… des moyens qui rendaient cet exercice moins exigeant, moins axé sur la représentation, et plus ancré dans une expérience d’interaction authentique?
Sources: Les recommandations pratiques 1 à 3 sont issues du travail du journaliste Vignesh Ramachandran (2021); la recommandation pratique 4 provient du travail du journaliste de CTVNews Jonathan Forani (2021); et la recommandation pratique 5 est tirée du travail de l’assistante de recherche diplômée de l’Université du Connecticut, Brianna Rae (2018).
Auteur:
Josh Quirion
Concepteur d’expériences d’apprentissage @KnowledgeOne |
Écrivain et rédacteur en chef de yolkliterary.ca
Josh Quirion est un ancien journaliste et instructeur au cégep. Il détient un baccalauréat en éducation de l’Université Bishop’s et une maîtrise en littérature anglaise et en création littéraire de l’Université Concordia. Quirion a publié son premier livre, Towners & Other Stories (Shoreline Press), en 2020.
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